Les conflits entre voisins ne sont malheureusement pas nouveaux ! En témoigne cette histoire de chèvres contée par les amis du vieux brindas…
Nous avons découvert aux Archives Municipales de Brindas plusieurs documents qui sont, pour la plupart des arrêtés pris par le maire en conformité avec la loi Rurale du 6 octobre 1791, et notifiés aux citoyens. Ils concernent des vols de bois, d’arbres, de grains de raisin et des ravages que font les animaux domestiques en liberté comme les moutons et les chèvres. Intéressons-nous cette fois-ci aux caprins…
Nous sommes en 1794… Un décret de la convention du 9 octobre 1793 a remplacé le nom de Lyon, rayé de la carte de France par celui de « Ville affranchie ». Les communes du Sud-Ouest lyonnais dépendent du district « campagne de commune affranchie » dont le centre est Saint-Genis-Laval appelée à cette époque « Genis-le-Patriote ». Brindas s’appelle alors Brindas-sur-Roche.
Le 26 Germinal An 2 (15 avril 1794), les administrateurs du district adressent aux Maire et Officiers municipaux de Brindas sur Roche la notification qui suit :
« Citoyens,
La chèvre est une espèce d’animal qui nuit de tous les temps à la végétation ; ses dents portent la mort à l’arbrisseau qu’elle broute, aussi a-t-il toujours été défendu d’envoyer les chèvres paître dans les champs ou dans les bois, comme les brebis. Les ressources qu’elles offrent ne peuvent certainement point entrer en comparaison avec les ravages qu’elles causent. D’ailleurs, il est possible de concilier les intérêts privés avec l’intérêt commun en les nourrissant à l‘étable. En conséquence, Citoyens, Magistrats, nous vous requerrons de notifier dans votre commune qu’il est défendu de sortir les chèvres de l’étable pour les envoyer brouter les haies ou les bois. Nous vous rendons responsables des moindres négligences à cet égard et de tous les maux qui pourraient en résulter. »
Le huitième floréal (27 avril 1794), la municipalité de Brindas-sur-Roche obéit et écrit à son tour :
« En conséquence de la réquisition de l’administration du District, nous notifions à tous les citoyens de notre commune qui ont des chèvres, de ne les point sortir de l’étable pour les mener brouter soit les haies, bois ou arbrisseaux. Permis à toute personne qui les trouverait dans les haies, bois et arbrisseaux de les tuer sur place. Et sera la présente publiée et affichée au-devant de la maison commune et à la place de la Liberté du dit Brindas, afin que personne n’en prétende cause d’ignorance. »
Parmi les autres articles concernant les chèvres, deux ont retenu notre attention :
« Néanmoins, il est loisible à tous les citoyens qui ont des chèvres de les mener paître soit dans les prés soit dans leurs terres. En les menant, ils seront tenus de les tenir en passant, soit par les chemins ayant des haies ou bois, avec une attache de trois pieds de long, et de ne point s’arrêter par les chemins ou le long des haies pour les faire brouter. Et lorsqu’ils seront arrivés dans leur prés ou terres, ils seront tenus de les attacher à un piquet éloigné de manière qu’elles ne puissent ni endommager les arbres ni les haies.
Et joignons à toutes personnes qui trouveront des chèvres abandonnées de les arrêter, et seront les propriétaires des chèvres condamnés à l’amende de six livres pour le dommage qu’elles auront causé qu’ils seront responsables, conformément aux lois, envers les citoyens qui en auront souffert. L’amende sera moitié au profit des personnes qui les arrêteront et moitié envers la commune, pour la première fois. Et pour la troisième confiscation des chèvres et la vente, en sera faite au plus offrant et dernier enchérisseur au profit de la commune. »
Heureusement, les choses ont bien évolué depuis… et les 60 chèvres alpines chamoisées du Gaec la Chèvrerie de la Joanna, de Sandrine Murat et Ludovic Morent, ne posent plus de problème aux Brindasiens !
Cet article a été publié dans L’Essentiel de Brindas N°86 de juillet 2021.