Par Gaston Bensan [1984]
Cette rubrique est une retranscription de l’ouvrage « Chronique Brindasienne », édité en 1984 par l’association du Vieux Brindas. Certaines des recherches proposées ici ont pu faire l’objet d’une mise-à-jour par des travaux plus récents. N’hésitez pas à compléter votre lecture par d’autres articles sur le site du Vieux Brindas.
Nous possédons une meilleure information sur la vie du village au XVIIIe. Pendant tout le siècle, les choses demeureront sans changement aussi bien dans les rapports de propriété de la terre, que dans les rapports sociaux et partant dans les mentalités.
Les habitants à 95% s’adonnaient à la culture et à l’élevage. La vigne tenait une grande place dans toutes les parties du village. Les produits de la terre assuraient l’autosubsistance. Le peu d’argent entrant dans les foyers provenait de la vente de l’excédent de vin et aussi de la pension perçue pour les enfants pris en nourrice. L’échange de services et de produits dominait. Le travail salarié était très rare pour ne pas dire inconnu, même pour les journaliers et domestiques nourris et logés chez le maître employeur.
Il y avait deux catégories de paysans :
- les laboureurs, petits exploitants possesseurs de lopins de terre ou de terres en censive
- et les grangiers ou fermiers, tenanciers de grands domaines dont les propriétaires, les Chanoines du Chapitre, les nobles et les bourgeois habitaient Lyon et quelque-uns le Bugey. Le grangier avait parfois sa propre terre à cultiver.
Les domaines étaient nombreux :
- au Boulot (à M. Dugas) ; à la Pillardière (à Mme des Champs) ; à la Grange
- du Plan et au Clos (à M. Dougny) ; à la Joanna (à M. Doncin) ; la Grange
- des Andrés (à Saconay) ; aux Brosses et au Plaisir (acquis par Guigou à Saconay) ; Granges de Saconay ou Savonost (à M. Dounis).
Un texte de 1788 précise qu’il y avait
« 100 habitants chefs de foyers propriétaires, 25 fermiers et grangiers, que toutes les fermes et granges sont tenues par les habitants à 1 exception de 4 fermes qui sont tenues par des fermiers étrangers qui n’ont point d autres domiciles dans la paroisse ».
Un texte de 1788
Les artisans étaient en petit nombre. Il exerçaient, sans pour autant abandonner, eux et leur famille, le travail de la terre, les activités les plus indispensables à la vie locale. Des documents divers nous font rencontrer :
- le maistre-masson Barthélemy Bodard en 1715 ou Jean Berticat en 1744 ;
- le masson et charpentier René Louis Neyrin en 1740 ;
- le maistre-serrurier Claude Brazier en 1706 ;
- les benniers ou tonneliers Antoine Guichard en 1727 et toute une lignée de Collomb à la Croix des Rameaux et au Gourd ;
- un marchand et maistre-tailleur en 1744, Jean-Louis Mercieux ;
- le maréchal-ferrant Pierre Melay ;
- Jacques Brun n’ouvrira un cabaret qu’en 1763 et se dira « obergiste » en 179 1.
Les cordonniers
Les cordonniers, 6 à 9 selon les périodes, représentaient la branche artisanale dominante. Ils travaillaient aussi, et souvent à façon pour les villages voisins. Des familles entières, les fils succédant au père, ou le gendre ou le cousin, étaient occupées à ce travail et à tous les degrés : apprenti ou garçon cordonnier, marchand cordonnier, maître-cordonnier.
La lignée des Farges, cinq générations, traverse tout le siècle à partir de 1692, jusqu’en 1799 et il y aura encore un Farges exerçant en 1827. Celle des Benoït a exercé le métier le siècle durant. Il y avait Benoît l’aîné, Benoît le cadet, le fils, le jeune, Benoît dit Blaize. Ils habitaient aux Places, à la Croix des Rameaux, à la Quinsonnière.
Les Pitiot étaient là en 1706, 1714, 1724.
Il faut ajouter les noms de Pierre Morellon en 1728, Pierre Marignier en 1792 et préciser que des liens de parenté unissaient ces diverses familles.
L’habitation
Nous pouvons avoir une certaine vue sur l’habitation et le mobilier. La maison moyenne comprenait, en général, un bas (rez-de-chaussée) donnant sur une cour ou suel et un haut (premier étage) avec une ou deux chambres et on y accédait de la cour par des degrés de pierre.
Elle était construite en pisé, sur soubassement de pierres, couverte de charpente et tuiles. Les portes et fenêtres étaient encadrées de dalles de granit, qui soutenaient le linteau de poutre mal équarrie.
Selon l’importance de l’exploitation, il y avait, bâtiments attenant ou séparés, une étable avec crèches et rateliers, une fenière, un chapit, pour le bois ou pour abriter tombereaux et chars, une grange, un cellier avec cuve, tonneaux et barreilles.
L’indispensable puits était dans la cour parfois servant à deux maisons mitoyennes.
La verchère, ou jardin potager, était à proximité du logis.
Le mobilier était de chêne ou de noyer, surtout de noyer. À cette époque, le noyer était abondant. Plantés le long des haies, il y avait une vingtaine d’arbres par ferme. On en tirait l’huile pour la consommation et pour le paiement des rentes faites au luminaire de l’Eglise.
De nombreux testaments donnent le détail du mobilier utile servant dans la plupart des habitations de Brindas : une grande table et deux bancs pour la cuisine, parfois des chaises de paille, la huche, un garde-manger à deux portes, ou un dressoir simple ou un dressoir de vaisselle avec deux tiroirs son dessus servant d’armoire. Dans les chambres, les bois de lit, parfois une garde robe (certaines à quatre portes) et surtout les coffres. Les coffres, selon l’usage étaient faits en sapin, en chêne et surtout en bois de noyer.
Les coffres étaient le meuble essentiel, dont on se servait le plus (1) pour ranger les « nippes » et les « hardes ». Le coffre constituait la dot minimum de l’épouse la plus démunie, même s’il devait être acquis à crédit, déjà !
Les sentiments religieux de cette population besogneuse et impécunieuse étaient très profonds. Le curé vivait au milieu d’elle, menait la même vie avec les mêmes soucis matériels (2).
(1) À Lyon, des « maistres coffriers » étaient les spécialistes de cette fabrication.
(2) Voir » Les curés de Brindas », page 33
Les bouleversements de la société
Tous les historiens font débuter le bouleversement lent et profond des rapports sociaux en France à partir de 1750. Au XVIIIe, dans cette société brindasienne « immobile » repliée sur elle-même, les premiers remous ne se feront sentir qu’en 1769. Les événements comme la destruction du château féodal, ou l’opposition à l’érection d’un pilori au XVIe étaient lointains même s’ils restaient dans les mémoires.
Vingt ans avant la Révolution, un acte « requis et octroyé » par le notaire royal marquant ainsi plus de solennité à la protestation, était établi sous l’impulsion de René Louis Neyrin et dans la maison de ce maçon charpentier et paysan, originaire de Chaponost (1). Cet acte dressait les « doléances des laboureurs brindasiens en ces termes » (2) :
Charles Demasso, Marquis de la Ferrière, Lieutenant Général des armées du Roy, ancien Lieutenant des Gardes du Corps de sa majesté, Chevalier de l’ordre Royal militaire de Saint-Louis, Sénéchal de Lyon, faisons savoir que :
Ce jourd’huy sixième aout mil sept cent soixante neuf, sur les trois heures de Relevé à l’issue de vespre de la paroisse de Brindas, le peuple sortant en grand nombre, et en conséquence de l’ordonnance de Monseigneur l’Intendant de la Ville et Généralité de Lyon en datte du huit Juillet dernier signé Defflessel, qui ordonne aux habitants de la ditte paroisse de Brindas de s’assembler en la forme, la manière accoutumés
pour délibérer tant sur la nécessité des Réparations du presbitaire de la ditte paroisse que sur les moyens d’en acquitter la dépense et être la ditte délibération à nous rapporté, pour être ordonné ce qu’il apartiendra.Les dits habitants pour satisfaire et se conformer à la ditte ordonnance se sont assemblés à la forme ordinaire dans la place publique dudit Brindas et se sont retirés dans la Maison de René Louis Neyrin habitant du dit Brindas pour faire la ditte délibération.
Par devant le Notaire Royal en la Sénéchaussée de Lyon sous-signé sont comparus Antoine Benoît habitant et sindic de la ditte Communauté, Pierre Juttet premier Consul en Charge de la présente année, Claude Guillon, Fleury Boyriven, Ennemond Chazottier, Antoine Benoît l’aîné,
Etienne Benoît, Antoine Cazot, Jean Corday, Pierre Boucher, Jean Delorme, Jean Guillon, Fleury Daguin, Jacques Joseph Marignier et Pierre Rivière tous habitant et composant la plus seine et majeure partie de la Communauté d’habitants de la ditte paroisse de Brindas, lesquels après avoir pris Lecture du procès-verbal de visite du dit presbitaire en datte du vingt six Juin dernier fait en conséquence de l’exécution de l’ordonnance de M. Bruyas Subdélégué en datte du dix Janvier, et ensuitte de celle de Monseigneur l’Intendant du Treise mars dernier, ont tous et unanimement dis et délibéré en se conformant aux ordonnances de Monseigneur
l’Intendant que toutes les Réparations contenues dans le susdit
procès-verbal ne sont pas absolument nécessaires, que pour les plus urgentes ils font offre et s’engagent de payer aux Entrepreneurs des dites réparations la somme de cent livres, qu’ils sont dans l’impossibilité de pouvoir fournir à une plus grande dépence, attendu qu’il leur reste encore une somme considérable à payer sur le dit presbitaire, que l’année dernière ils firent construire une Ecurie au presbitaire qui leur a coûté considérablement, qu’ils sont d’ailleurs surchargés d’impôts, que depuis plusieurs années les récoltes ont manqué dans la ditte parroisse, que la gresle a emporté cette année la moitie de la Récolte de Blé et du vin, et enfin qu’ils sont réduis à la dernière misère.De laquelle délibération les susdits Sindic, Consuls et habitants ont requis acte qui leur a été octroyé par le Notaire Royal soussigné.
Fait au dit Brindas, maison sus ditte de René Louis Neyrin situé au lieu de la place près le Bourg du dit lieu.
ACTE « REQUIS ET OCTROYÉ » PAR LE NOTAIRE
ROYAL, établi sous l’impulsion de René Louis Neyrin, dressant les « doléances des laboureurs brindasiens (VINGT ANS AVANT LA RÉVOLUTION)
René Louis Neyrin et son gendre Antoine Cazot feront les frais de cette initiative téméraire. Ils seront par la suite tenus à l’écart de la communauté d’habitants.
Toutefois, cette expérience de l’action collective et de démocratie locale pour éphémère qu’elle fut n’a pas été inutile. La communauté continua à jouer son rôle à côté de celui de la paroisse.
Lorsque l’autorité royale procéda en 1788 à la nomination de la première municipalité de Brindas il n’y eut qu’un changement de nom, les responsables de la communauté administraient les affaires communales conservant à leur tête Jacques Brun le syndic, le même qui avait été député désigné en 1787.
La mise en place des institutions nouvelles se fit donc aisément et l’élection de la Municipalité en 1790 se fit sans difficulté apparente malgré un certain mécontentement d’une partie de la population. Rappelons qu’à la veille de la Révolution il y avait à Brindas une centaine de laboureurs-exploitants et 25 grangiers.
Le régime ancien de la propriété étant brisé, les exploitants directs en étaient bénéficiaires, libérés des anciennes redevances (dîmes, cens ou servis) alors que par le maintien du métayage les grangiers restaient toujours dépendant des propriétaires, nobles et bourgeois et s’estimaient écartés des bienfaits de la Révolution.
Brindas-sur-Roche
Les difficultés les plus sérieuses apparurent au moment de la Convention lorsque les noms des saints furent bannis et que Brindas ainsi que d’autres localités de la région se virent imposer un nouveau nom :
- Saint-Genis-Laval changé en Genis-le-Patriote était centre du district,
- Saint-Martin-en-Haut, Martin-l’Espérance,
- Saint-Symphorien-Ie-Chatel, Chausse Armée,
- Sainte-Foy-I’ Argentière, Foy-sur-Brévenne,
- Saint-Genis-Ies-Ollières, Les Ollières
Certaines localités pourtant dépourvues du parrainage d’un saint virent égaIement leur nom transformé. Ainsi Thurins devint, par ferveur patriotique sans doute, Thurins-le-Français, et Brindas plus prosaïquement traité, se vit octroyer le nom de Brindas-sur-Roche. Le fait est certain, les Brindasiens boudèrent le nouveau nom. Les documents municipaux ne mentionnent Brindas-sur-Roche que dans la courte période de juillet à septembre 1794, où la Terreur atteignait son paroxysme. Pourtant le nouveau nom, rappelait presque à la lettre la description que les habitants eux-mêmes avaient faite de leur terroir.
Répondant en 1788 à l’enquête de l’Assemblée Départementale de l’élection de Lyon, la municipalité de Brindas affirmait, au sujet de la nature des fonds :
« II y a un petit nombre de bicherées de 1re classe, le surplus des fonds de la paroisse n’est que sables et sur roche, et par conséquent de très faible valeur. »
On peut comprendre la réticence des Brindasiens envers le nouveau vocable, il était équivoque. Brindas-sur-Roche pouvait à la fois s’appliquer au village isolé, à l’écart sur son monticule, ou viser la vie en marge de ses habitants. Il pouvait être perçu comme un avertissement : avancer l’argument de faible rendement de la terre pour voir les impôts et taxes allégés était une pratique courante et excusable sous la monarchie, mais sujet à caution sous la République. Rien de surprenant si, à la différence des habitants des localités voisines plus dociles, les Brindasiens aient réagi à ce qu’ils pouvaient considérer être dicté par la malveillance et la dérision.
Le grand attachement de la population à la religion avait aussi créé une vive opposition aux mesures prises par la Révolution : entraves à l’exercice du culte, persécution des prêtres, désaffectation de l’Eglise. Il y eut bien, au début de l’an II certaines exactions : vitraux de l’église fracassés, autels renversés, meubles et armoires saccagés, mais ce n’était que le fait d’un petit nombre. Les anciens fabriciens et François Boyriven, recteur en fonction depuis le 1er mars 1789, surent mettre à l’abri des linges et ornements de l’Eglise. L’Eglise, devenue Temple de la Raison d’abord et ensuite Temple de l’Eternel servait aux réunions décadaires (selon le calendrier républicain) qui prenaient un caractère coercitif :
« On y faisait lecture des décrets de la Convention Nationale et des arrêtés des Corps Administratifs afin que personne n’en prétende cause d’ignorance »
Les vieilles rancunes atténuées ou oubliées, la population, unité refaite, manifestait chaque fois que possible, sa ferveur religieuse. Lorsqu’en l’an IV il y eut un court répit aux persécutions, les linges et ornements du culte appartenant à la Fabrique furent, cette fois officiellement confiés et pris en charge par trois fabriciens, les bancs et les meubles inventoriés et une souscription publique pour leur restauration recueillit la somme énorme pour l’époque de 3.846 Francs et 10 sous.
La Révolution, même si elle avait gêné les Brindasiens dans la pratique religieuse n’avait en rien affecté leur foi ni l’emprise spirituelle exercée par l’Eglise.
« Registre de la Municipalité de Brindas pour transcrire les différentes délibérations de la Communauté et les Lettres Patentes du Roi sur les Décrets de l’Assemblée Nationale – A commencé du 17 Février 1790 »
Les persécutions recommencèrent, sous le Directoire. après le 18 Fructidor 1795, et il a fallu attendre le Concordat de 1801 mis en vigueur en août 1802 pour que le Conseil Municipal de Brindas puisse proclamer :
« Qu’ainsi disparaissent tous les éléments de désordre et tous les obstacles que la malveillance pouvait opposer au retour de la paix intérieure » .
Tableau de répartition du terroir brindasien
1897 Réponse à l’enquête de l’Intendant d’Herbigny
Seigle et quelque peu de froment | 2.000 bicherées | 260 hectares |
Vigne | 1.000 journées d’homme | 43 hectares |
Prairie | 200 journées d’homme | 85 hectares |
Bois | 200 bicherées | 26 hectares |
Total | 414 hectares |
1803 Réponse à l’enquête du Conseil de Commerce de Lyon
Terres labourables ensemencées en blé, froment et autres grains | 2.700 bicherées | 350 hectares |
Vigne | 500 bicherées | 65 hectares |
Pré | 1.250 bicherées | 170 hectares |
Bois | 710 bicherées | 92 hectares |
Terres incultes | 1.700 bicherées | 220 hectares |
Flaches et paquarages | 290 bicherées | 38 hectares |
Broussailles | 300 bicherées | 39 hectares |
Total | 7.450 bicherées | 974 hectares |
Notes
1 – La superficie du territoire communal actuellement est de 1.284 hectares.
2 – Entre les deux dates 1697 et 1803 le nombre d’habitants avait doublé, ce qui explique la plus grande utilisation du terroir.
3 – Il était courant pour éviter le lourdes impositions d’atténuer les possibilités de revenu. C’est probablement le cas pour les chiffres de la vigne. Au début du XIX- siècle, la surface cultivée en vigne avoisinait 200 hectares.
4 – La bicherée = 12 ares 93.
5 – La journée d’homme – 4 ares 28 environ.
Recensement de 1799 – Répartition de la population active (>12 ans)
Nombre de foyers | Total population active > 12 ans | Natifs de Brindas | Nés hors Brindas | Hommes | Femmes | |
Le Château – Le Bourg | 29 | 87 | 59 | 28 | 44 | 43 |
Le Château – Les Places | 17 | 55 | 35 | 20 | 26 | 29 |
Le Guillermy | 7 | 25 | 17 | 8 | 14 | 11 |
Le Chazottier | 8 | 26 | 10 | 16 | 10 | 16 |
La Pillardière | 9 | 39 | 33 | 6 | 18 | 21 |
Le Brochaillon | 8 | 24 | 21 | 3 | 11 | 13 |
Les Andrés | 6 | 29 | 19 | 10 | 10 | 19 |
Le Gourd | 7 | 24 | 21 | 3 | 10 | 14 |
Le Boulot | 5 | 17 | 9 | 8 | 8 | 9 |
Les Ayats | 1 | 3 | 2 | 1 | 1 | 2 |
Les Brosses | 1 | 4 | 4 | 2 | 2 | |
Le Buyat | 1 | 2 | 2 | 2 | ||
Chalinel | 3 | 12 | 6 | 6 | 6 | 6 |
Croix des Rameaux | 8 | 29 | 25 | 4 | 11 | 18 |
La Grand Cour | 2 | 4 | 3 | 1 | 2 | 2 |
Les Hotteaux | 1 | 1 | 1 | 1 | ||
La Joanna | 2 | 10 | 7 | 3 | 7 | 3 |
Le Milon | 3 | 8 | 2 | 6 | 3 | 5 |
Le Moncel | 6 | 22 | 15 | 7 | 12 | 10 |
La Patetière | 1 | 4 | 3 | 1 | 2 | 2 |
Le Pilon | 1 | 4 | 3 | 1 | 3 | 1 |
Le Plaisir | 2 | 6 | 2 | 4 | 3 | 3 |
Le Plan | 1 | 5 | 3 | 2 | 2 | 3 |
La Quinsonnière | 5 | 14 | 8 | 6 | 5 | 9 |
Sacconay | 1 | 4 | 4 | 2 | 2 | |
Le Soyard | 2 | 8 | 7 | 1 | 2 | 6 |
TOTAL | 137 | 466 | 320 | 146 | 217 | 249 |
Population enfantine (< 12 ans) | 283 | 119 | 164 | |||
Présents aux armées | 22 | 22 | ||||
POPULATION TOTALE | 137 | 771 | 358 | 413 |
Note
Les noms en gras désignent les Hameaux signalés déjà en 1697.
Le Château désigne le centre du village regroupant les maisons du Bourg et des Places.
Les autres noms désignent des lieux dits, des domaines ou des écarts.
Aux alentours de 1800
1800, le changement de siècle marque à Brindas la ligne de séparation entre deux époques :
- celle qui s’achevait avec la fin et du féodalisme et de l’économie agraire de l’autosubsistance,
- et une ère nouvelle qui devait bouleverser les rapports sociaux et moraux et les mentalités.
Des documents précieux nous renseignent sur la population et l’état de choses à cette époque :
- le tableau d’utilisation du terroir (page 16) ;
- le recensement de 1799 qui nous permet de présenter un tableau de répartition (page 171) et une pyramide des âges (page 18).
- la réponse du Maire Malaval à l’enquête du Conseil du Commerce en 1802.
Ce rapport sur la vie économique et sociale du village est intéressant, bien qu’il laisse percer un pessimisme exagéré.
Enquête du conseil de commerce – Ville de Lyon
Réponse du Maire de Brindas, 11 décembre 1802
1° Sur la production
La production des terres est en bled seigle et bled froment, en partie en pommes de terre, très peu de fruits, quelque peu de légumes.
2° La consommation
Les grains qui se réussissent année commune ne suffisent pas pour la consommation de la population au moins pour 8 mois de l’année, nous n’y pouvons suppléer qu’en ayant recours à la Grenette de Lyon pour ce qui manque où dans les pays à bled soit à la montagne voisine ou dans le Dauphiné.
3° Sur le vignoble
Les vignes sont partie principale de nos propriétés et production rurale. La qualité de nos vins est bien médiocre, c’est cependant la seule production que les habitants de la commune ont pour subvenir à leur entretien et consommation et au payement de leurs contributions et pour subvenir aux autres besoins d’entretien domestique.
Le seul débouché est la ville de Lyon pour le vin et autres menues denrées. Le vin, son exportation se fait ordinairement depuis le mois de Brumaire jusqu’en Ventose (1), après ce temps il n’est pas assuré de pouvoir se transporter. Son exportation l’exposerait, le propriétaire ne peut le vendre qu’au pée(1 el risque de l’acheteur. La seule voie qui y conduit est par la route de-Francheville qui est très mauvaise sur toute la commune ayant une côte et un pont qui est très rapide et qui en gêne la circulation ce qui rend les charrois très mauvais et que les chemins auraient besoin de réparations considérables pour le transport des denrées el marchandises pour la Ville, même des autres communes.
4° Sur les forêts
Il n’y a point de forêt en bois d’haute futage, que quelques petits coins de bois taillis et quelques rivages dans les haies de clôture des propriétés des habitants de la commune qu’on étronche tous les 6 ans pour les besoins et qui ne suffisent pas pour la consommation étant obligé d’y suppléer pour leurs besoins par les charbons de pierre qu’on se procure partie par voilure ou par dos de bête de somme des carrières de Rive-de-Gier.
Commerce et manufacture
Les habitants sont tous agricoles, n’ont point de commerce et manufacture particulière que pour les besoins de la commune.
Pour ce qui concerne les commerces et manufactures qui y existent :
1° il y a quatre individus fabriquant en étoffes de soie pour le compte des négociants de la ville. Six individus cordonniers ne travaillant qu’une partie de l’année pour les communes voisines et la ville dont ils tirent les matières utiles à leur art et métier.
2° l’on croit point qu’il soit utile d’un établissement d’aucune nouvelle fabrication, branche de travail ou d’industrie, étant trop à la proximité de la ville capitale du département, ou les différents arts du travail el d’industrie et fabrication sont abondants de novembre à mars et très multipliés, ce qui fait que les familles qui existent dans notre commune un grand nombre surtout la jeunesse fixent leur vue et s’attachent aux manufactures de la ville en y allant fixer leur résidence pour travailler aux différents arts de travail et d’industrie.
Les habitants de notre commune, très laborieux étant attachés à la culture de leur terrain qui demande un travail assidu et continu et qui est très souvent peu productif à cause de la médiocrité de leur terrain qui est très ingrat, manquant d’engrais pour son abonification.
Ce sont toutes les observations que je crois pouvoir faire au Conseil de Commerce de la Ville de Lyon et de leur témoigner la sincère reconnaissance de la considération et du dévouement qu’ils ont envers notre commune et leur présenter ma reconnaissance particulière et mes respects et saluts.
Malaval
Revenons au recensement de 1799. La place nous manque pour une étude plus poussée. Ce sera l’objet d’un travail ultérieur. Nous nous contenterons, cette fois, de quelques réflexions sur les patronymes. La liste de tous les noms de familles relevés dans le recensement est publiée dans la partie documents, (pages 84-85). 120 patronymes pour 137 foyers sont portés : 32 par 314 personnes (hommes et femmes) ; 36 par 85 hommes ; 52 par 67 femmes. Le nombre des patronymes transmissibles, ceux des femmes (noms de jeunes filles) ne pouvant l’être est excessivement restreint : 32 + 36 soit 68 (les spécialistes estiment que le nombre des noms de famille en France dépasse facilement 100 000). Le classement des groupes les plus nombreux d’habitants homonymes nous permet d’établir la liste ci-dessous limitée à 14 noms.
Hommes | Femmes | Total | Ancienneté à Brindas | |
Benoît | 22 | 6 | 28 | 1575 |
Boyrivent | 21 | 7 | 28 | 1631 |
Marignier | 18 | 7 | 25 | 1658 |
Morellon | 12 | 6 | 18 | 1445 |
Mercieux | 14 | 3 | 17 | 1662 |
Chazottier | 10 | 5 | 15 | avant 1600 |
Collomb | 12 | 2 | 14 | 1657 |
Bonjour | 10 | 3 | 13 | 1450 |
Michallon | 8 | 5 | 13 | 1635 |
Brun | 8 | 3 | 11 | avant 1600 |
Blanc | 10 | 1 | 11 | 1702 |
Rivière | 6 | 5 | 11 | 1765 |
Guillon | 7 | 3 | 10 | |
Juttet | 7 | 3 | 10 | 1706 |
165 | 59 | 224 |
Ainsi donc, le groupe des personnes portant un des 14 patronymes les plus répandus atteignait le nombre de 224 soit une moyenne de 16 alors que pour les 106 autres, le nombre était de 242 avec une moyenne d’un peu plus de 2. Le premier groupe rassemble les plus vieilles familles de Brindas, pour lesquelles nous avons pu donner la date de la plus ancienne trace écrite trouvée dans les archives, mais la présence de certains d’entre elles est certainement antérieure.
D’autres noms de familles anciennes avaient disparus en 1800 ou étaient en voie de disparition. Quelques uns se retrouvent dans les noms des lieux, comme Soyard, Grossan, Chaninel, Quinson. Ne laissons pas tomber dans l’oubli les Roux, les De la Place et faisons une mention spéciale au plus vieux noms, sans doute, porté encore par des descendants vivants, Fuchery, transformé au cours des siècles en Fuchy, Fuchier, Fuchez, Farchière… et même Fuchier Guillarme qui a donné son nom au Guillermy.
Les vieilles familles constituaient donc le groupe dominant, véritable « conglomérat familial » conservateur des coutumes et traditions.
Beaucoup de mariages se contractaient à l’intérieur du groupe, multipliant des liens de parenté, qui étaient embrouillés à l’extrême. Comme l’Eglise veillait attentivement aux mariages entre parents, on trouve dans les registres paroissiaux des cas nombreux de consanguinité de 3e et 4e degré (mariage entre oncle et nièce, tante et neveu, cousins germains). Signalons le cas pour sa singularité ; un mariage entre frère et sœur (2e degré en ligne collatérale) célébré le 26 juin 1759 avec dispense par un Edit du Pape du 5 mai, fulminé le Il juin par le Vicaire Général du Diocèse de Lyon.
Concernant les patronymes, une autre remarque doit être faite. Tous les noms de famille, localisés dans le village ou dans la proche région (en 1800) ne figurent pas dans les dictionnaires établis par les spécialistes de l’anthroponymie.
C’est là aussi un aspect de l’isolement de ce secteur et nous espérons que des recherches futures viendront combler cette lacune.